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Quand tout va bien, peut-il quand même y avoir lieu de s’inquiéter? Nous vivons normalement dans un monde de retour à la normale, en ce sens que bien qu’une période faste soit toujours plaisante, il arrive souvent qu’elle soit suivie d’une période éprouvante. C’est sans doute ce que pensent plusieurs investisseurs ces jours-ci. Depuis la liquidation du « jour de la libération » d’avril, la pire chose à faire aurait été de s’asseoir sur son argent. En effet, la majorité des indices boursiers ont grimpé de plus de 35 % jusqu’à atteindre ou frôler des sommets inégalés.

Ce n’est pas ce à quoi s’attendaient ceux qui se sont contentés de lire les manchettes. Les tarifs douaniers et les querelles commerciales continuent d’inquiéter et de semer l’incertitude. La situation géopolitique est désastreuse, il y a des guerres partout et les tensions s’exacerbent en Asie. Le marché de l’immobilier est au point mort et le stress économique semble s’intensifier. Pourtant, les marchés font peu de cas de ces préoccupations et continuent d’escalader allègrement le proverbial mur de l’inquiétude.

Le Federal Open Market Committee (FOMC) des États-Unis — comité fédéral du marché ouvert — s’est enfin joint à la danse des réductions de taux avec sa première coupe depuis décembre. Depuis son élection, le président Trump n’a cessé de réclamer l’allègement des taux. Mais les conditions requises étaient absentes et les taux n’ont été réduits que le mois dernier. Parce que le marché du travail a montré des signes de faiblesse cet été et qu’on reconnaît désormais que nous devrons peut-être vivre avec une inflation élevée, le président de la Fed Powell a cédé et a soustrait 25 points de base des taux d’intérêt, tout en laissant entendre qu’il y aurait d’autres réductions. Une décision applaudie par le marché.

Les investisseurs ont été entraînés à croire que des taux de rendement inférieurs sont une bonne chose pour le cours des actions. Et bien que cette réduction de taux d’intérêt semble plus politique qu’économique, le résultat a été le même, car les acheteurs ont continué à déverser leur argent dans les actions.

Mais combien de temps encore durera cette lune de miel? À bien des égards, le cours des actions semble hors de prix, surtout en ce qui a trait aux grands chouchous que sont les mégaentreprises technologiques. L’optimisme est poussé à l’extrême et les investisseurs font montre d’une complaisance incroyable. On pourrait soutenir que la valorisation de plusieurs segments du marché est maintenant exactement parfaite. C’est une perspective alarmante, car la perfection dure rarement longtemps.

Une façon de se soustraire à ce danger est de se concentrer sur des noms individuels et d’éviter le marché élargi. Le marché est rapidement en train de devenir le terrain des sélectionneurs d’actions. Avec l’augmentation des F&A et de l’activité des entreprises, il se pourrait que nous assistions à un regain d’intérêt pour les traînards, et les petites entreprises semblent particulièrement attrayantes.

Et puis, il y a l’or. Cette valeur refuge n’a pas connu une année aussi éblouissante depuis des décennies avec un cumul à ce jour de presque 50 %. Ce n’est pas ce à quoi on s’attend quand les actifs risqués sont en hausse. C’est peut-être le signe que tout ne va pas aussi bien qu’il y paraît. Le dollar américain a dégringolé de 10 % cette année, et ceux qui prétendent qu’il pourrait perdre son statut de monnaie de réserve mondiale ne font plus rire d’eux. Le degré d’endettement des États-Unis demeure historiquement élevé, et nous croyons que le « Big Beautifu Bill » n’aidera pas.

Donc, où en sommes-nous? On ne s’attendait pas à des rendements exceptionnels cette année, et pourtant, les marchés ont dramatiquement surpassé toutes prévisions. Combien de temps encore pourrons-nous contempler la verte vallée en faisant fi des drapeaux rouges? C’est la question à un milliard de dollars. La bonne nouvelle est que plusieurs entreprises ont réussi à majorer leurs bénéfices et que nous entrons dans un cycle de réductions de taux. Mais les choses deviennent-elles trop faciles? Après le sprint que nous venons de vivre, le retour à la normale pourrait survenir de nulle part et faire très mal. Le quatrième trimestre est habituellement le plus fort pour les marchés, mais en cette année où la saisonnalité a failli, est-ce que ce sera encore le cas? Peut-être est-il temps de récolter ses gains et de chercher de meilleures occasions.

Greg Taylor, CFA
6 octobre 2025