La valeur sous-estimée d’une stratégie à long terme

Mars 16, 2018
Rédigé par Felix Narhi
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« Je demande à tout le monde d’adopter une perspective à long terme sur un horizon de cinq à sept ans plutôt qu’une perspective à court terme sur un horizon de deux ou trois ans. » — Jeff Bezos

Amazon est une entreprise remarquable dont la croissance est basée, en partie, sur une stratégie à long terme inébranlable. Jeff Bezos, fondateur de l’entreprise, ne se soucie pas des résultats trimestriels, car il est tout à fait conscient que les résultats à court terme ne font que refléter les actions et les initiatives prises par Amazon plusieurs années auparavant. Il est sans cesse préoccupé par la direction de l’entreprise d’ici cinq à sept ans, plutôt que par ce qui se produit actuellement. Il est très inhabituel de constater une telle perspective dans le monde des affaires, mais cela est beaucoup plus probable lorsque l’on parle d’entreprises menées par leur fondateur. Cette perspective est également très importante dans le domaine du placement. Le fait de penser à long terme a une incidence sur la façon dont vous planifiez ainsi que sur là où vous consacrez votre énergie, votre temps, votre argent et vos ressources. Bien que nous gérions les soubresauts du marché à court terme, nous gardons toujours à l’esprit trois facteurs à long terme.

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  1. Nous estimons que le grand cycle de 35 ans des taux d’intérêt a probablement atteint un niveau plancher en 2016

Les taux d’intérêt entament probablement une montée qui est susceptible de durer encore longtemps. Comme nous l’avions spéculé dans notre dernier commentaire de fin d’exercice financier, cette grande nouvelle n’a pas fait les manchettes, mais elle pourrait avoir de profondes répercussions à long terme sur la valeur des actifs et les stratégies de placement. Lorsque les grands cycles entament une réorientation, cela engendre généralement des conséquences sur plusieurs années, voire plusieurs décennies, pour les investisseurs.

Il suffit de demander à Bill Gross, ancien gestionnaire vedette en obligations chez PIMCO, à quel point il peut être agréable d’agir au bon moment et de surfer sur une vague séculaire pendant des décennies. Il convient de remarquer que la réussite de M. Gross et de PIMCO coïncidait avec une époque d’expansion du crédit — à savoir une période où ceux qui visaient les opérations de portage, qui vendaient la volatilité et qui favorisaient le rendement ainsi qu’un risque de crédit plus élevé ont bien réussi. Comment répondre si le fait était que les taux d’intérêt à zéro, qui définissent la fin d’une époque de rendement total entamée dans les années 1970, avaient accéléré en 1981 et atteint en 2016 une impasse mathématique en ce qui concerne les obligations, et cela va de soi, les autres catégories d’actifs connexes ?

Nous soupçonnons que bon nombre des stratégies gagnantes de ces dernières décennies pourraient ne pas être aussi efficaces à l’avenir, peu importe les bons moments du passé (c’est à vous qu’on parle, « titres assimilables à des obligations » — voir notre entrée de blogue de juillet 2016 intitulée Utilities – Reward-free risk ?). Quoiqu’il arrive, serrez bien vos ceintures — nous sommes sur le point de découvrir la réponse.

  1. Les périodes perturbatrices comme celle que nous traversons actuellement ont un impact sur les occasions qui se présentent à nous

Plusieurs secteurs, sinon la plupart, sont en train d’être remodelés par les forces perturbatrices liées à l’évolution technologique. Nous sommes d’avis que l’une des grandes leçons de la microéconomie est de savoir comment faire la distinction entre le moment où la technologie vous aide et celui où elle vous fait obstacle. Et c’est bien ce que nous constatons chez les anciennes entreprises qui peinent à rivaliser avec l’agilité et la flexibilité de compétiteurs nés à l’ère numérique, comme les entreprises surnommées les FANG (Facebook, Amazon, Netflix et Google), tout en demeurant concurrentielles et en maintenant leurs coûts à un niveau raisonnable. L’étude de cas qui dresse Sears contre Amazon est peut-être la plus appropriée pour les autres secteurs touchés par des modèles d’affaires perturbateurs et des technologies qui modifient le comportement des consommateurs. 

Baidu, souvent dénommé « le Google de la Chine » est un important perturbateur que nous avons ajouté à plusieurs de nos Fonds au début de l’année 2017. En général, nous ne parlons pas de manière approfondie de nos titres individuels, mais Baidu fut une des rares exceptions (cliquer ici pour voir l’article écrit l’an dernier) qui, selon nous, représentait une entreprise à très forte capitalisation mal comprise et mal aimée qui se cachait sous notre nez. Un autre titre que nous avons ajouté en 2017 et qui fait partie de cette catégorie est celui de TripAdvisor, le plus grand site de voyage au monde. Nous avons ouvert notre position au début du mois de juillet l’an dernier et avons doublé la mise après une vague de liquidation en novembre. La solide réputation dont jouit TripAdvisor parmi les voyageurs en ce qui concerne la recommandation d’hôtels, de restaurants et d’attractions touristiques, a fait de l’entreprise l’une des propriétés en ligne les plus importantes et dont l’expansion est la plus rapide. Pourtant, elle demeure largement sous-monétisée. En un mot, nous estimons que la direction réussira à résoudre ce problème ou que l’entreprise sera vendue à un acheteur stratégique à une prime par rapport à notre prix d’entrée. Tant que les nombreuses propriétés de TripAdvisor continuent de faire grimper le nombre d’utilisateurs particuliers (fort effet de réseau), la valeur interne de l’entreprise devrait continuer de croître à un bon rythme. Au bout du compte, nous estimons que cela représente une monétisation latente et nous envisageons un important potentiel de plus-value si elle demeure une entreprise indépendante, et un prix avantageux si elle fait l’objet d’une prise de contrôle. Il suffit de penser à Facebook après son introduction en bourse il y a presque six ans, lorsque la direction est passée avec succès d’un modèle axé sur les périphériques informatiques à une stratégie axée sur les dispositifs mobiles. Les gains potentiels liés à la monétisation d’une base massive et croissante d’utilisateurs engagés peuvent vraiment être à couper le souffle. D’ailleurs, la valeur de l’action a décuplé après avoir atteint un niveau plancher en août 2012.  

Renseignez-vous sur l’effet perturbateur de l’évolution technologique en lisant ce billet de blogue, comprenant des commentaires sur Syntel (SYNT) et Discovery (DISCK).

  1. Presque tout est cyclique

Comme le dit le dicton, « les actions ne sont généralement pas à bon prix et populaires en même temps ». Souvent, nous commençons notre quête pour de bonnes occasions dans les entreprises et les secteurs qui traversent des moments difficiles et que nous comprenons bien. En effet, les actions d’entreprises comme celles-ci sont plus susceptibles d’être mal évaluées. Nous tâchons de cerner la source du pessimisme dans de telles situations et opérons parfois la transaction inverse lorsque notre perspective va à l’encontre de celle du marché ou lorsque nous estimons que les investisseurs ne tiennent pas compte des autres attributs importants de l’entreprise. Il arrive que ce genre de situation prenne longtemps avant de se résorber, mais nous préférons demeurer patients aussi longtemps que la valeur interne de l’entreprise continue de progresser et qu’elle continue d’améliorer sa position concurrentielle, et ce, même si la valeur de l’action souffre entretemps. Il arrive que nous fassions erreur et que notre patience ne soit pas justifiée. Soit les faits changent ou bien notre stratégie de placement est tout bonnement erronée. Dans de tels cas, il est préférable de vendre et de passer à autre chose (citons comme exemple récent celui de Altisource Portfolio Solutions que nous avons vendu en 2017). Le plus souvent, nos erreurs sont liées à la synchronisation, surtout lorsqu’il s’agit d’un titre créateur de rendements composés. Au bout du compte, la valeur de ces entreprises progressera et elles finiront par « secourir » les investisseurs qui ont mal choisi le moment de leur achat.

Bruce Flatt, PDG de Brookfield Asset Management, a récemment écrit une autre superbe lettre énonçant certaines des leçons tirées par l’équipe de gestion. M. Flatt a écrit ce qui suit à ce sujet, « le moyen le plus efficace de vous sortir d’une situation difficile est d’être patient avec vos placements et, dans la majorité des cas, de doubler la mise. Il s’agit de la meilleure façon de recouvrer des pertes, mais vous devez faire preuve de conviction et disposez du capital nécessaire. Ceci est particulièrement important lorsque vous achetez les titres d’une bonne entreprise, mais que vous choisissez mal le moment de votre achat. Dans de tels cas, il vaut presque toujours mieux doubler la mise. Cependant, il faut être prudent, car s’il s’agit tout bonnement d’une mauvaise entreprise, agir ainsi ne fait que remuer le couteau dans la plaie. Cela dit, de façon générale, à moins de changements technologiques exceptionnels, nous estimons que le fait de doubler la mise et d’être patient représente le moyen plus efficace de redresser un mauvais placement. »

De même, nous nous efforçons de demeurer patients (ou de doubler la mise) en ce qui concerne les bonnes entreprises qui traversent des moments difficiles — nous avons appris que les vents contraires cycliques ont généralement tendance à changer de direction et à devenir des vents arrières. Parmi les principaux titres que nous avons achetés lorsqu’ils traversaient des moments difficiles et que nous avons vendu à profit l’année dernière, citons Panera Bread, Wynn Resorts, KKR et Whole Foods. Ces titres appartenaient tous à des entreprises menées par leur fondateur et ils ont tous généré des rendements exceptionnels pour nos investisseurs pendant la période au cours de laquelle ils figuraient à nos portefeuilles.

« Le temps d’acheter est quand le sang coule dans les rues. » — Baron Rothschild

À ce titre, nous avons acheté à la fin 2014 le producteur d’acier sud-coréen Posco à titre d’occasion profondément cyclique nous permettant d’exploiter l’escompte. Sur le plan purement statistique, nous avons ouvert notre position à un prix très intéressant. Depuis son entrée à la bourse aux États-Unis en 1994, la seule courte période où le titre de Posco s’est vendu à un prix meilleur marché était lors de la crise financière asiatique de 1997-1998. Le titre a ensuite connu un rebond spectaculaire et sa valeur a quadruplé en deux ans. Toutefois, comme nous l’avons vite (ré)appris, chaque situation est différente. L’année après notre achat initial, le secteur sidérurgique a traversé l’un des cycles les plus difficiles de son histoire et le titre de Posco a dégringolé et atteint des niveaux plancher records. Le titre qui se négociait à un prix se rapprochant de son niveau le plus faible depuis 20 ans, a atteint des niveaux plancher jamais vus jusqu’à lors, et nous sommes persuadés que les générations futures vont sans doute utiliser cet exemple pour illustrer « le pire des scénarios » (un peu comme nous l’avons fait avec la crise financière asiatique). Cette période atroce nous a obligés à faire preuve de la plus grande patience et à demeurer courageux à la fin 2015. Ainsi, tant que nous estimons qu’il n’y a pas eu d’atteinte grave à l’entreprise sous-jacente, nous essayons de garder à l’esprit que « le temps d’acheter est quand le sang coule dans les rues ». Nous avons élargi notre position au cours de cette période de baisse en raison de notre conviction selon laquelle Posco, le fabricant d’acier le plus efficace au monde, allait survivre. Si les secteurs mondiaux de la fabrication et de la construction avaient besoin d’acier à l’avenir, Posco serait encore là après que ses pairs moins efficaces aient fait faillite. Depuis lors, les conditions d’exploitation se sont grandement améliorées, les actifs non stratégiques ont été vendus ou restructurés et une bonne partie de la dette a été remboursée. Sans surprise, le prix de l’action a été refixé et l’action est devenue l’un des titres les plus performants de Pender en 2016 et 2017 (nous avons profiter de la reprise pour réduire notre position). Avec un peu de recul, nous avouons que nous avions bien mal choisi le moment de notre achat initial. Cependant, puisque nous avons élargi notre position pendant la période de ralentissement, nous avons pu générer un rendement intéressant pour les investisseurs pendant la période au cours de laquelle l’action figurait à nos portefeuilles. Point important, le rendement de nos dépenses en immobilisations progressives a été extraordinaire. La morale de l’histoire est que tant que les faits jouent en votre faveur, vous devriez toujours envisager d’acheter « lorsque le sang coule dans les rues » — même quand il s’agit de votre propre sang.

Renseignez-vous sur la façon de tirer parti des cycles dans ce billet de blogue comprenant des commentaires sur Liberty Global (LBTYA), Liberty Latin America (LILA), Platform Specialty (PAH) et Colfax (CFX).

Felix Narhi, CFA

Le 16 mars 2018

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